La contagion émotionnelle

 

Il y a quelques temps, je vous expliquais à quel point les chiens savent lire et reconnaitre les émotions humaines en se basant sur les sons émis (voix heureuse ou fâchée par exemple) ou sur l’expression du visage.

Ces tests, fait en laboratoire, sur écran étaient déjà intéressant, mais il manquait un élément important : l’émotion.

Aujourd’hui, je vais aller encore plus loin et parler de reconnaissance et de partage des émotions entre le chien et son humain de compagnie.

Pendant longtemps, on a pensé que l’empathie et la sympathie étaient des qualités purement humaines.

La sympathie signifie “ressentir avec”. On fait un avec l’objet observé et on partage ses pensées et sentiments. La conscience est déplacée de soi vers l’autre. Il y a fusion. L’empathie signifie “ressentir en dedans”. On partage le point de vue d’autrui, pour observer ses pensées et sentiments.

Ca semble compliqué tout ça… pourtant pas tant que ça.

L’humain est un être de réflexion : il est de ce fait tout à fait capable de sympathie car il « comprend »

Le chien est un être d’émotions : l’empathie est sa première qualité. Il ressent « en-dedans ».

 

Ca… tous les propriétaires de chien le savaient intuitivement. Mais là où cela devient intéressant, c’est que la science à prouvé que le chien est capable d’empathie… mais aussi de contagion émotionnelle.

La contagion émotionnelle ou contagion affective est le transfert des émotions d’une personne émettrice vers une personne réceptrice. Elle doit être distinguée de la sympathie et de l’empathie.

Cette contagion émotionnelle, entre chiens, a été mise en avant en 2015 par une équipe italienne*

La contagion émotionnelle est une forme fondamentale d’empathie qui rend les individus capables de ressentir les émotions des autres. Chez les primates humains et non humains, la contagion émotionnelle peut être liée au mimétisme facial, une réponse automatique et rapide (moins de 1 s) dans laquelle les individus imitent involontairement les expressions des autres. Ici, nous avons testé si le mimétisme rapide du corps (arc de jeu, PBOW) et du mimétisme rapide (bouche ouverte, ROM) est présent chez les chiens domestiques (Canis lupus familiaris) pendant le jeu intraspécifique dyadique. Au cours de leurs interactions ludiques libres, les chiens ont montré une réponse mimique plus forte et rapide (moins de 1 s) après avoir perçu PBOW et ROM (deux signaux typiques du jeu chez les chiens) qu’après avoir perçu JUMP et BITE (deux modèles ressemblant à PBOW et ROM dans le moteur). performance). Des séances ludiques ponctuées de mimétisme rapide ont duré plus longtemps que ces séances ponctuées seulement de signaux. De plus, la distribution du mimétisme rapide était fortement affectée par la familiarité qui liait les sujets impliqués: plus le lien social était fort, plus le niveau de mimétisme rapide était élevé. En conclusion, nos résultats démontrent la présence de mimétisme rapide chez les chiens, l’implication du mimétisme dans le partage de la motivation ludique et la modulation sociale du phénomène. Tous ces résultats concourent à soutenir l’idée qu’un lien possible entre le mimétisme rapide et la contagion émotionnelle (un bloc d’empathie) existe chez les chiens.

 

D’accord, les chiens sont capables de savoir les émotions de leurs congénères, de les partager… mais ca sert à quoi de savoir ça ?

Et bien cela sert à aller encore plus loin… une autre équipe de chercheurs s’est interrogée sur un éventuel transfert émotionnel inter-spécifique (de l’humain vers le chien… et inversement)

Les réponses ont été très intéressantes ! Cette étude de 2016** met en avant une inter-compréhension et une inter-communication des émotions entre l’homme et le chien.

Plusieurs études ont examiné la compréhension des chiens (Canis lupus familiaris) et l’utilisation d’indices communicatifs humains. Relativement peu d’études ont cependant examiné les effets du comportement affectif humain (c’est-à-dire, les expressions faciales et vocales) sur le comportement exploratoire et le suivi des chiens par les chiens. Dans deux expériences, nous avons examiné la fréquence des chiens à suivre le geste de pointage d’un adulte en localisant une récompense ou un traitement caché lorsqu’il se produisait en silence, ou lorsqu’il était associé à une expression affective faciale et vocale positive ou négative. Comme les études antérieures, les résultats actuels démontrent que les chiens suivent de manière fiable les indices de pointage humains. Contrairement aux études antérieures, les résultats actuels démontrent également que l’addition d’une expression faciale et vocale affective positive, associée à un geste de pointage, n’augmente pas de manière fiable la fréquence de localisation d’un aliment caché par les chiens par rapport au pointage seul. De plus, et dans les conditions d’affectations faciales et vocales négatives des expériences 1 et 2, les chiens ont été retardés dans leur exploration, ou leur approche, vers un bol appâté ou simulé. Cependant, dans l’expérience 2, les chiens ont continué à suivre le geste de pointage d’un adulte, même lorsqu’il était associé à une expression négative, aussi longtemps que le geste d’orientation faisait référence à un bol appâté. Ensemble, ces résultats suggèrent que l’addition d’informations affectives n’augmente pas ou ne diminue pas significativement le comportement des chiens. Ces résultats démontrent plutôt que la présence ou l’absence d’expressions affectives influence le comportement exploratoire des chiens et que la présence ou l’absence de récompense influe sur le fait qu’ils suivent un geste d’attention de l’adulte non familier.

 

 

Bon… OK. Et nous… Ca nous sert à quoi de savoir tout ça ?

Et bien, cela va nous servir au quotidien.

 

Sachant que le chien connait, reconnait et vit nos émotions, il devient clair que celles-ci peuvent le submerger totalement. Et cela est particulièrement vrai pour un chien réactif, souvent plus sensible que la moyenne.

Imaginez la scène :

Fido à l’habitude de réagir vivement à chaque croisement avec un congénère. Vous le savez, et cela vous stresse. D’avance, vous êtes attentif à tout votre environnement…

Par mimétisme : Fido devient encore plus attentif.

Voyant cela, vous commencez à stresser… Ou donc se cache cet autre chien qui rend Fido nerveux ? vous commencez à imaginer la scène de rencontre : Fido qui aboit, bondit… votre stress monte et votre émotion se transmets à Fido, qui se mets à stresser aussi…

Et PAF : l’autre chien déboule au coin de la rue. L’émotion explose, Fido aussi.

On est en plein dedans !

Certes, Fido aurait réagi de toute manière. Il a ses émotions à lui, et elles lui suffisent pour cela.

Mais, et on le voit régulièrement en cours, il aurait sans doute réagi moins fort s’il n’avait eu que ses émotions à gérer.

Régulièrement, on me dit : « c’est fou : quand vous êtes là, il réagit à peine ! »

C’est normal… Je suis calme. Et mon calme se transmet.

La contagion émotionnelle est là : vous vous sentez sécurisé, vous êtes plus détendu… De ce fait, Fido est aussi plus détendu et donc… il réagit moins fort.

Mais alors ? on fait comment ?

Quelques clés… même si j’ai tout à fait conscience que ce n’est pas facile.

  • Partir dans de bonnes conditions : éviter d’aller promener son chien quand on a eu une journée de boulot difficile ou que l’on a appris une mauvaise nouvelle

 

  • Avoir des plans : tout mettre en œuvre pour y arriver. Ne pas penser à l’objectif final et qu’on attend tous : que le chien ne réagisse pas, mais se concentrer sur le moyen d’y arriver. Si vous pensez au résultat vous allez vous mettre la pression et donc faire ressurgir vos émotions.
    • Un plan c’est de petites étapes réalisables au quotidien, menant au résultat final : pensez à une belle randonnée en montagne : il faudra plusieurs petites étapes avant d’atteindre le sommet (objectif). Si l’on vous dit directement d’atteindre le sommet, vu d’en bas… vous serez vite découragé, la tâche semblera impossible ! Si l’on vous dit : à la première fontaine… au point de vue… au chalet… vous arriverez au sommet facilement ! les étapes vous auront rendu l’ascension plus facile.

 

  • Se concentrer sur la « forme » de l’exercice et non sur le fond, en développant sa concentration intérieure.

 

  • Partir positif : vous allez y arriver ! Ce n’est pas un “peut-être, je vais essayer”, c’est “on va y arriver”. Et surtout : souriez ! Rien que sourire permet de réduire votre stress (et ça non plus je ne l’invente pas 😉 C’est scientifiquement prouvé ***)

 

  • Faire des pauses pendant la balade, se féliciter et féliciter son animal même pour « rien », cela vous permet de vous remettre tous les deux dans des émotions positives, le caresser doucement , lui proposer un jeux de recherche de friandises. Cela permettra de réduire le taux de cortisol et d’augmenter le taux d’endorphine de tout le monde… et ça c’est bon pour réduire le stress !

 

  • Tenir un cahier de bord sur lequel vous noterez chaque réussite ! Vous verrez rapidement que le nombre de réussites est largement supérieur aux « échecs » et surtout que les réussites augmentent de jour en jour ! Quoi de meilleur pour se mettre en confiance ?

 

  • Terminer sur une réussite !

 

Et selon moi, le plus important :

  • Faire un travail sur soi : le plus difficile, se remettre en question – comprendre notre malaise et travailler dessus et développer sa confiance en soi (mais là… ce n’est plus de mon ressort – il existe plusieurs types de stages/ lectures etc pour apprendre à se faire confiance, et donc faire confiance aux autres et… à son chien)

 

Notre mode de vie actuel est stressant au quotidien, notre temps doit être optimisé. Notre quotidien est fatiguant. Beaucoup de sujets mettent à mal nos émotions et notre chien le ressent.

 

Liens vers les études citées

 

* http://rsos.royalsocietypublishing.org/content/2/12/150505

** https://link.springer.com/article/10.1007%2Fs10071-015-0934-5

*** http://niveau-superieur.com/les-8-bienfaits-insoupconnes-du-sourire-et-5-conseils/

 

 

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